Belle vieille carcasse

Handsome Old Truck

Texte et photos • Text and photos
Pierre Cavale

Une seule image peut amplement suffire à mon bonheur. Lors d’une visite au marché de Noël de Toronto, elle s’est présentée sous la forme d’un vieux camion.

A single image can amply suffice for my happiness. During a visit to the Toronto Christmas Market, it came in the form of an old truck.

Un jour de décembre, je me suis rendu à Toronto présenter mon court-métrage «Infiniment unies». J’en ai profité pour visiter le Distllery district, où je n’étais encore jamais allé. On y tenait, comme à tous les ans, un très charmant marché de Noël. J’y suis allé, caméra en bandoulière. Il faisait un de ces temps humides qui vous rongent les os. J’ai vite eu les doigts gelés. Ce ne fut donc pas ma meilleure journée pour faire de bonnes images. N’empêche, une seule peut amplement suffire à mon bonheur.

Elle s’est offerte à moi sous la forme d’un vieux camion qui semblait échoué là, en marge de la fête, dans un racoin à l’extrémité du marché, tout tristounet à côté de petits manèges pour enfants. Mon appareil et moi avons tout de suite craqué pour sa gueule d’enfer. J’ai pris le temps d’en faire le tour et j’en ai retenu cette photo. Pour rendre toute l’essence de la bête, j’en ai tiré deux traitements, un en couleur pour évoquer la rouge flamboyance de ses jeunes années aujourd’hui gommées par la rouille, et puis un autre en noir et blanc, pour mettre en lumière la force brute qui en émane, avec ses nombreuses traces d’usure comme autant de fières cicatrices que seuls les grands aventuriers peuvent exhiber. 

One day in December, I went to Toronto to present my short film “Together, Infinitely”. I took the opportunity to visit the Distllery District, where I had never been before and where, as every year, the most charming Christmas market is held. So here I was, camera in hand. It was one of those wet days that are gnawing at you. Promptly, my fingers got frozen. It was not my best day to make good pictures. Nevertheless, only one can amply suffice to my happiness.

It came in the form of an old truck that seemed to be stranded there, on the sidelines of the party, in a raconnette at the end of the market, all shabby next to small children’s rides. My camera and I immediately cracked for its hellish face. I took the time to explore all its angles and finally kept this picture. To enhance all the essence of the beast, I made two versions of it, one in color to evoke the red flamboyance of its young years now weathered by rust, and then another in black and white, to enlighten the brute force that emanates from it, with its many traces of wear like so many proud scars that only great adventurers can exhibit.